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Une redoutable bactérie augmente le risque de rejet de greffon

Les responsables des transplantations aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) s'inquiètent de l'arrivée possible d'une bactérie qui fait des ravages aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne (archives). KEYSTONE/SALVATORE DI NOLFI sda-ats

(Keystone-ATS) Une infection provoquée par la bactérie Clostridium difficile double le risque de rejet de greffon chez les patients transplantés d’un organe. C’est la conclusion d’une étude menée à une très large échelle en Suisse. Reste maintenant à comprendre ce mécanisme.

“Nous avons été très surpris par ce résultat qui devrait faire beaucoup de remous”, a indiqué à l’ats le professeur Christian van Delden, infectiologue de transplantation aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Il a dirigé ce projet de recherche dans le cadre de la Cohorte Suisse de Transplantation (STCS).

La bactérie Clostridium difficile (C. difficile) se multiplie dans la flore intestinale suite à la prise de traitements antibiotiques. Elle libère alors une toxine qui s’attaque à la paroi intestinale, causant des diarrhées et des colites pseudomembraneuses. Les cas les plus sévères débouchent sur des “mégacôlons toxiques”, une complication potentiellement mortelle.

Des données exhaustives

Cette bactérie fait des ravages aux Etats-Unis. Les autorités considèrent que c’est un problème de santé publique majeur avec 250’000 infections, 14’000 décès et des coûts supplémentaires d’un milliard de dollars par année. La Suisse est encore épargnée par des clones hypervirulents qui sévissent également en Grand-Bretagne. Les clones circulant en Suisse provoquent des diarrhées moins sévères.

Des scientifiques des six centres de transplantation suisses se sont penchés sur le lien entre cette bactérie et les patients greffés d’un organe solide. Ils ont analysé les données récoltées par le biais de la Cohorte Suisse de Transplantation, soit une base statistique “très puissante” alimentée par la quasi-totalité des transplantés du pays. L’exhaustivité de cette cohorte est “un modèle unique au monde”, selon le Pr van Delden.

Une question de microbiote

Au total, les caractéristiques de 2158 transplantés ont été analysées. Les résultats qui prennent en compte toutes les variables potentiellement responsable d’une perte du greffon sont clairs: un patient transplanté ayant été infecté par la bactérie C. difficile a 2,24 fois plus de risques de perdre son greffon.

Cette conclusion, qui fait l’objet d’une publication dans l’American Journal of Transplantation, ouvre un champ d’investigations important. Il faudra notamment s’interroger sur l’importance du microbiote pour la survie d’un greffon, avance le Pr van Delden.

Il n’est pas exclu qu’à l’avenir des collectes de selles soient intégrées dans la Cohorte Suisse de Transplantation. Il faudrait alors procéder à des analyses métagénomiques pour découvrir quels types de bactéries forment le microbiote des greffés et si une perturbation de ce dernier est associée avec la survie du greffon.

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